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vendredi, novembre 22, 2024
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LA MOUVANCE INTELLECTUELLE ANTI SYSTÈME AU SÉNÉGAL OU LA CONVERGENCE TACTIQUE ENTRE DES INTELLECTUELS OCCIDENTALISÉS ET DES INTELLECTUELS ISLAMISTES ANTI CONFRÉRIQUES

Le Sénégal est perçu par certains courants intellectuels comme un  pays à dominante islamo- Wolof.

Cette thèse est statistiquement commode, les Wolofs étant l’ethnie majoritaire et l’Islam la religion de plus de 90 % de la population.

L’évocation de la question de la domination islamo -wolof n’est pas nouvelle, elle remonte à la période coloniale.

Plus près de nous dans le temps, elle a été abordée par des analystes et chercheurs, à la fin des années 1980, avec comme précurseur l’éminent socio- anthropologue, feu le Professeur Abdoulaye Bara Diop, dans son ouvrage majeur, «la société wolof, entre traditions et changements». Le Professeur  Abdoulaye Bara Diop s’appuie d’ailleurs sur beaucoup de sources issues d’études , de recherches et de monographiques réalisées par des européens, souvent commanditées par les autorités coloniales.

Ensuite et de manière beaucoup plus critique, voire subversive, du point de vue des perspectives sociales et politiques, par le brillant historien, le Professeur Mamadou Diouf,  enseignant- chercheur  à l’Université de Columbia aux USA.

C’était au début des années 2000, dans son ouvrage intitulé «La Société islamo -Wolof et ses périphéries» .

Le Professeur Mamadou Diouf allant même jusqu’à affirmer, au milieu  des années 2000, en 2007 plus précisément sur la Radio West Africa Democraty repris par Seneweb. Com , après une argumentation assez contestable sur ce qu’il nomme l’hégémonie Wolof, que «l’élection du Sérère et Chrétien Léopold Sédar Senghor était un accident de l’histoire»!

En le paraphrasant, il poursuivra toujours lors de cette intervention «qu’après Abdou Diouf, puis Wade, les Wolofs allaient être Président du Sénégal pour au moins 50 ans»!

Cette affirmation a été très vite démentie par la réalité politique en 2012, après l’élection du Président Macky Sall, d’ethnie Halpoulaar!

Un autre démenti et le plus cinglant, c’est la représentativité politique du leader de l’ex Pastef, Ousmane Sonko, issu d’une ethnie relativement minoritaire, les Diolas !

Sur un plan plus strictement politique, la problématique de l’hégémonie islamo-wolof a été aussi agitée par le Mouvement des Forces Démocratiques de Casamance (MFDC) depuis des Emile Badiane, Ibou Diallo, entre autres, à la fin des années 1940.

Ce point de vue sur de la domination islamo-Wolof a été en plus des fausses allégations historiques sur la Casamance , l’un des arguments fétiches de certains idéologues du MFDC, pour tenter d’expliquer et de justifier la rébellion armée.Ils l’exprimaient souvent dans des termes comme «le mépris culturel, l’invasion des gens du Nord, l’accaparement des terres et des richesses etc».

L’argument de l’hégémonie islamo-wolof, découle d’un certain empirisme sur des constations notées , dans les effectifs de personnes qu’on identifie à des Wolofs selon le nom, le lieu de provenance et la religion, dans les administrations, la politique, le commerce et l’économie principalement.

Les personnes dont les noms sont à consonance wolof et de confession religieuse musulmane, étaient pour l’essentiel majoritaires dans les secteurs clefs, cités plus haut, non pas par une volonté systématique de domination d’une ethnie ou d’une religion sur les autres, d’un «impérialisme» nordiste planifié, mais par des facteurs d’abord historiques liés à l’exploitation et à la valorisation de richesses de la colonie sénégalaise, consistant à  favoriser en terme de développement les régions côtières et centrales et à marginaliser les régions périphériques, surtout celles pauvres et enclavées. C’est ce qu’on a appelé l’économie de traite coloniale.

Dans cette optique l’école, l’administration, les infrastructures , les services et équipements de bases, l’économie et le commerce , ont été des discriminants importants, ensuite les migrations socio- économiques internes et les brassages inter- ethniques, enfin le sous- peuplement relatif de certaines zones périphériques du pays et les conséquences terribles au plan humain et sur les écosystèmes des grandes sécheresses des années 70 et 80 dans certaines parties nord et centre du pays; entraînant, sous le Président Senghor, en réponse sur le plan de l’aménagement du territoire, le lancement du grand projet des Terres neuves. Ce projet des Terres neuves a consisté à déplacer des populations nombreuses, des wolofs et des Sérères principalement, de leur lieux d’habitation et de culture extrêmement hostiles, vers des terroirs plus propices aux activités agro- sylvo-pastorales.plus précisément vers les réglons sous-peuplées et plus favorables, comme Tambacounda (Niani Ouly, Nguene, Saal, Gouloumbou ) et Kolda( Medina Yoro Foula, Bassin de l’Anambé) .

Ensuite, les Presidents Diouf et Wade à leur tour , conscients du retard socio- économique, humain, infrastructurel, de l’enclavement et de la faible valorisation des régions périphériques et de ses conséquences néfastes sur l’unité et la cohésion nationale, ont déployé des efforts en terme d’investissements, dans le sens du rattrapage de développement.

Mais incontestablement, celui qui a systématisé dans son projet politique cette dimension rattrapage des régions périphériques et en retard de développement, a été le Président Macky Sall. D’abord de par ses options politiques pragmatiques et fortes relatives à la territorialisation effective,  au désenclavement, à l’électrification, à l’accès à l’eau potable, à la santé, à l’éducation, aux infrastructures et équipements sociaux de base, le tout adossé à une politique d’inclusion sociale hardie.Ensuite grâce aux projets de développement révolutionnaires qui ont permis de mettre en oeuvre ces politiques à la base, le PUDC, le PUMA, la CMU, les Bourses de sécurité familiales avec l’effet de levier des grands projets structurants d’infrastructures et de services notamment d’accès à l’eau, à l’électricité, aux financements et au crédit dans les campagnes.

Le Président Macky Sall, plus que ses prédécesseurs, a prouvé dans les faits, que le problème de ce qu’on a appelé la périphérie du pays islamo-Wolof, mais en vérité les régions périphériques, enclavées,sous valorisées, n’était pas un problème d’ordre ethnique ou religieux, mais,

fondamentalement, une question d’un retard de développement injuste à combler pour assurer la continuité territoriale et l’harmonie socio-économique de la nation sénégalaise..

Cette conception de l’hégémonisme islamo-wolof s’est exprimée de manière régulière dans les thèses politiques du MFDC, de ses origines au déclenchement du conflit armé casamançais en 1982 et après.

De plus,  convenons en définitivement, au  Sénégal, il n’y a de moins en moins une identité entre le nom de famille et l’appartenance ethnique. L’appartenance ethnique relève plus maintenant de la culture vécue en famille et en communauté que d’autres considérations spécieuses.

La conscience nationale sénégalaise, c’est à dire ce que Senghor appelait « un commun vouloir de vie commune. », s’est formée depuis la nuit des temps, dans la Senegambie pré-coloniale, pour se consolider au fur et a mesure.

Parmi les intellectuels occidentalisés qui théorisent et assument , peu ou prou, les thèses de l’essoufflement de ce qu’ils appellent le modèle social islamo- wolof, on peut citer, pour les plus connus, Monsieur Alioune Tine, grande icône de la Société civile sénégalaise, fondateur de la Raddho, leader actuel de l’ONG internationale Africa Jomm Center et aussi, curieusement, le Professeur Penda Mbow qui, bien que très proche du pouvoir, semble avoir, sur le plan des idées, les thèses parmi les plus systématiques sur la question. Le Professeur Penda Mbow en intellectuelle organique plus qu’une politique, théorise et assume publiquement et à haute voix, l’idée du déclenchement du processus d’une révolution sociale au Sénégal, se réalisant sur les décombres d’un modèle social islamo- wolof en crise et en décadence.

Des intellectuels occidentalisés anti systèmes

Les intellectuels occidentalisés anti systèmes , en terme de provenance, ont trois origines : les anciens adeptes du Grand Soir «non encore repentis!» (ex communistes et révolutionnaires), les idéologues et cadres politiques issus du MFDC reconvertis à la démocratie et certains militants de la société civile,  des panafricanistes, des activistes et beaucoup de citoyens politiquement vierges.

Cependant, pour le plus gros du contingent, ces intellectuels sont  des jeunes et des adultes qui font leur baptême de feu politique à travers le patriotisme et le populisme ambiants.

Mais une précision importante s’impose, tous les intellectuels occidentalisés anti systèmes, ne sont pas fondamentalement des anti islamo- Wolofs.

Les intellectuels occidentalisés anti islamo-Wolofs sont très minoritaires et pour les plus radicaux, ils cherchent fondamentalement à politiser la question ethnique au Sénégal en la plaçant au cœur du débat politique et public. Ils ont cependant, avouons-le, peu de chances de réussir dans leur stratégie, parce que, les sénégalais sont écrasement allergiques et opposés à l’introduction de considérations ethniques et religieuses, dans le champ public et politique.

La raison est que depuis la période pré- coloniale, nos  ethnies et communautés humaines, vivent  en harmonie dans l’espace sénégambien, qui est un espace territorial, culturel, religieux, sociologique et économique relativement homogène; cela, en dépit de la grande diversité des peuplements et des cultures.

Ces intellectuels, de peur d’être taxés d’attenter à la cohésion et à l’unité nationales, d’être identifiés au MFDC ou à certains lobbies occidentaux, LGBT notamment, enrobent et dissimulent leur stratégie dans l’anti-systèmisme politique, qui se décline dans la lutte contre la domination étrangère, française en particulier, contre la mal gouvernance et la corruption, mais aussi dans un discours patriotisant et panafricaniste très virulent à résonance populiste.

Que personne ne s’y trompe!

L’objectif final, conscient ou inconscient, des idéologues et cadres politiques de cette obédience est le renversement de ce qu’ils nomment le « système. »(islamo-Wolof) dont les deux piliers centraux sont, selon eux, d’une part le régime politique en place et d’autre part les confréries religieuses musulmanes dominantes.

Certains parmi ces intellectuels sont accusés, à tort ou à raison, de vouloir créer les conditions d’une fragmentation, d’une balkanisation de la Nation sénégalaise , comme en Lybie , en République Centrafricaine, en RDC , pour permettre à certaines lobbies mafieux internationaux qui les soutiennent et en collusion avec eux, de leur permettre de faire main basse sur les importants gisements gaziers, pétroliers et les autres ressources naturelles et minières dont recèle notre pays.

Des intellectuels islamistes anti- systèmes

Certains intellectuels islamistes anti- systèmes sont décidés à combattre de manière résolue, mais subtile et dissimulée, idéologiquement et politiquement, l’islam confrérique représenté par les grandes Tarikhas Tidianes (Tiwaouane, Niassenes, Omariens, Medina Gounass, etc.), Mourides, Layenes et Khadres, qui constituent une digue quasi infranchissable à la réalisation de leurs ambitions sur le sol sénégalais.

Ces intellectuels regroupés dans des cadres fraternels affiliés à certaines obédiences, les Frères musulmans pour la Jaamatou Ibadou Rahmane et Salafistes pour d’autres, moins visibles légalement et plus radicales, apparentées aux Quataries, aux Koweïtiens et autres mouvances islamo-intégristes et terroristes africaines et arabes.

L’identité relative d’intérêts entre le pouvoir politique en place et les confréries musulmanes dominantes, théorisées par les anti- systèmes, constitue la raison objective de leur jonction dans l’action politique et justifie leur alliance avec tous ceux qui contestent et combattent le régime du Président Macky Sall.

Dans cette optique, l’émergence de Pastef en tant que grand parti de masse, a constitué une aubaine pour toutes ces personnes et groupes, parce que leur offrant l’instrument politique et idéologique inespéré pour régler par les urnes ou d’autres moyens politiques, n’excluant pas la violence, la question de la liquidation du «système».

A ce propos, le ralliement massif et quasi automatique à la mouvance Pastef de nombreuses franges de personnes jeunes issues des Daaras traditionnels, créés pourtant par les confréries, et de certains intellectuels et communautés d’Arabisants (Association des Domou Daraas, Association Samm Jikoyis, etc.) se disant exclus d’un système qui favorise les « occidentalisés. » est très symptomatique de ce phénomène.

Au surplus, le profil et le cursus du leader de l’ex- Pastef, Ousmane Sonko, est le  symbole du syncrétisme de ces deux courants anti- systèmes et expliquent à suffisance leur alliance objective et  incontestable.

Concernant les religieux anti- systèmes, souvent issus des mouvements Ibadou et salafistes, bien que majoritairement issus de l’ethnie Wolof, leur alliance avec les intellectuels occidentalisés et autres mouvances anti- systèmes, découle de l’exigence tactique de fragiliser et de défaire d’abord le système politique incarné par le régime marron-beige et du même coup, affaiblir et fragiliser les confréries qui le soutiennent. Pour ensuite, passer à l’étape ultime , soit par la mise aux pas des grandes confréries musulmanes ou simplement  leur liquidation par l’interdiction et la répression combinées.

En vérité, et ce que ne dit pas tout haut, l’aile radicale des intellectuels islamistes sénégalais, c’est qu’elle voit dans nos confréries des ennemis stratégiques qui sont des hérésies dans l’Islam et des innovations non conformes à la Souna, à combattre intelligemment, patiemment et sans concession.

Dakar, le 20  août 2023

Youssou DIALLO

Président du Club Sénégal Émergent

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