L’ouvrage de M. Birame Demba dit Ibrahima Ngaary FAYE, griot de naissance, qui revendique à voix audible son statut de griot, sa «griotitude» aurait dit un astucieux et audacieux lexicographe. Condition de griot, qualité de griot, griot de case, historien, journaliste; tout ramène à cette catégorie de personnes qui, en Afrique de l’Ouest, dans la tradition, se réserve l’exclusivité de l’art oratoire pour dire, avec verve, à l’occasion des nombreux événements de toute nature, l’histoire de sa communauté en général, et/ou celle d’une famille en particulier. Même quand il est en politique, cette caractéristique, cette propension hypertrophiée à déclamer, parait chez M. Faye.
À l’état civil, Birame Demba, le fils cadet de Gorgui et de Ndjira Sène, a été baptisé Abdou Ngaary, homonyme de son grand-père paternel. Il est né vers 1949 à Diakhao Sine, village historique fondé entre 1287 et 1302 par Maa Sinig Wassila (entendez Wassila roi du royaume du Sine). Descendant d’une des plus vieilles familles de la contrée, Faye s’est forgé un destin par- semé d’embûches: s’il ne souffre pas de maladies (méningite, varicelle), il se heurte aux difficultés de la vie, telles que son premier échec au concours d’entrée en classe de sixième des lycées et collèges en 1961 et son renvoi de la maison d’accueil à Dakar, une conséquence de son exclusion de l’école pour indiscipline». Débrouillard à souhait, il surmonte ces épreuves tout comme les multiples pièges au quotidien qui se dressent devant lui dans la mégapole naissante qu’était le Dakar des Yadicone, Ibou Mbaam, Ngalla, Grand Tôlier, Grand Thié et autres caïds. Au final, l’homme est parvenu à s’imposer comme journaliste-reporter, historien, maître de cérémonie lors des événements sociaux (mariages, baptêmes). Ce livre qui se veut Repère de l’histoire du Sine, traverse les âges, les générations, les Eres, et se pose au terme de cette longue pérégrination en une référence incontournable pour l’étude la compréhension du pays sérère dans toutes ses facettes. D’où pertinence de son titre: Ères et Repères». Connu comme maitre de la parole, cet autodidacte ou self-taughtman, pour parler comme les Anglo-saxons, nous donne une autre facette de son rapport avec le livre. Pour la première fois de sa vie, il ne lit pas: il écrit. Et quel régal!
Quid de l’auteur ?
Journaliste autodidacte le premier de Diakhao, chercheur écrivain et ancien Conseiller en communication de cinq ministres de la République du Sénégal, Birame Demba Faye, Lamngaaary Ben Rahim ou Ngagne Demba, nom et pseudonymes bien connus des lecteurs des journaux nationaux, a fourbi ses armes dans plusieurs rédactions de la place. Armé d’un capital-expérience de quarante ans de lecture à laquelle il a consacré son temps, à la cadence d’un livre par semaine, cette belle plume, originaire de Diakhao- Sine, c’est une lapalissade de dire qu’il s’en glorifie, nous retrace dans cet ouvrage l’histoire de son Sine natal sur fond de son tumultueux cursus scolaire et professionnel. Sérère bon teint, enraciné et ouvert, homme sensible, intransigeant et récalcitrant par nature, historien et témoin absent de l’histoire comme il aime à se qualifier, Birame laisse parler sa prodigieuse mémoire une mémoire d’éléphant, comme dirait l’autre pour une invite au voyage dans l’univers de son enfance, de son adolescence et de son présent de septuagénaire. Le tout entre Diakhao et Dakar. Griot de naissance, fier de sa «griotitude», gardien de la tradition, l’image de ses aïeux, ce maitre de la parole sait puiser dans les racines de sa culture pour, via sa sève nourricière, enseigner, former, et communiquer la quintessence de l’histoire de son Sine, d’hier à aujourd’hui.
Extrait réalisé par Cheikh Seck NDONG