L’agriculture, en particulier de pays comme le Sénégal, s’inscrit dans une économie administrée avec un «État social interventionniste» même si l’on veut faire croire le contraire car les agricultures américaine et européenne sont des plus soutenues avec un subtil maquillage des systèmes d’aides et un camouflage des mécanismes d’assistance.
«Soyons réalistes: le libéralisme agricole n’est que de façade. Autrement dit, l’agriculture est dans le régime d’exemption du périmètre libéral !
Concomitamment, le Nord utilise des subterfuges d’écran de compétition déloyale et autres stratagèmes de frontières d’anti-concurrence qui vont au-delà du dumping commercial. Ils ont pour noms des barrières tarifaires et surtout non tarifaires avec: – des instruments institutionnels (OMC…), – des outils techniques (norme, label, bio, AOC, IGP…), – des dispositifs écologiques (biosécurité, certification phytosanitaire, émergence zoonotique…)- des filtres socio-démographiques: visa d’entrée, concours académique, passeport vert, quitus sanitaire …) ; – des leviers économiques (bourse, INCOTERMS, inland & ocean economy, licence, agrément, …) ; – etc.
La géopolitique agricole mondiale déteint donc sur les agrégats macroéconomiques comme sur l’atomicité de la microéconomie des exploitations agricoles familiales de la ruralité sénégalaise.
Gouvernants administrateurs et technocratiques au sommet de l’État comme Agripreneurs promoteurs et gestionnaires à la base sont en déphasage verticale ou en opposition horizontale dans leurs prises de décisions stratégiques et choix opérationnels relativement à la « chose agricole », sensu lato !
Le souffle du vent souverainiste alimentaire ne doit pas être un effet de mode en « copier-coller », ni un suivisme comme des moutons de panurge, encore moins un mimétisme maladif contagieux.
Or, il nous a été donné et habitué de constater un « ministère sénégalais de la campagne agricole, voire de l’arachide et de l’oignon ». Force est de constater qu’à l’accoutumée, nous assistons ainsi à une gestion conjoncturelle avec un pilotage à vue de l’agriculture sénégalaise qui, au demeurant, est en porte-à-faux avec un management stratégique, mieux prospectiviste à la fois structurel et structurant de l’agriculture du Sénégal !
Pour preuve, une campagne agricole qui semble avoir comme pis-aller le « préfinancement » des intrants subventionnés de l’État par des Opérateurs privés qui vont lever en l’an N des crédits au niveau de « banques commerciales et non de développement » pour se voir payer par l’Etat en l’an N+1 leurs quotas en différés avec des soupçons et suspicions : – de collusion et corruption, – d’opacité et d’obstruction,
– de prête-nom et d’entité-écran, – de surfacturation et de rétro-commission, – de dessous-de-table et de pot-de-vin, – de faux et détournement d’objectif,- de délit d’initié et de conflit d’intérêt, – de fraude/évasion fiscale, d’exonération et d’allègement indu, etc.
Les rapports des institutions et corps de contrôle de l’Etat (IGE, OFNAC, Cour des Comptes…) corroborent ces constats de cupides faussaires en République et d’avides fossoyeurs en Rue-Publique, sans foi ni loi qui sucent sans vergogne la sueur et le sang de dignes et braves agriculteurs !
Aux nouvelles autorités, notamment de l’Administration agricole sénégalaise, il faudrait des mesures fortes, pragmatiques et réalistes qui marquent un signal fort de rupture paradigmatique d’avec les pratiques malsaines et non-orthodoxes telles un cancer qui gangrène malencontreusement la sphère agricole et agripreneuriale aussi bien publique que privée.
Le premier laboratoire de test et d’essai de la « vision de transformation systémique » est la gestion transparente, juste et équitable des équipements agricoles et des intrants, particulièrement les semences et engrais subventionnés, de la campagne agricole 2024…
Certes les Forces de Défense et de Sécurité (FDS) peuvent apporter leur compétence distinctive en matière de génie militaire, de facilitation logistique et de civisme disciplinaire (ou, discipline civique).
Mais pour autant, il ne faudrait pas tomber dans l’erreur de substituer Le Militaire à L’Agronome, ni dans la mise sous tutelle de l’administration agricole vis-à-vis des Forces Armées.
En effet, l’Agriculture naît avec une tare congénitale incrustée du syndrome VICA : Volatilité, Imprévisibilité, Complexité, Ambiguïté. Une Agriculture dont le sujet societal est le Vivable Sociologique (femme et homme) et l’objet social est le Vivant Biologique (végétal et animal) à support Vital Minéral.
En tout état de cause, il ne revient pas à l’Agronomie de rester bras croisés et se voir supplantés et suppléés par la Militarisation même si l’on vit un monde crisogéne et criminogène, anxiogène et accidentogène, mutagène et morigène… avec une prégnance des défis sanitaire et sécuritaire, climatique et énergétique, alimentaire et réglementaire, démographique et urbanistique, monétaire et militaire, etc., surtout dans l’espace sahélien dont relève le Sénégal.
Au Militaire son métier de l’Arme, à l’Agronome son métier de la BioTerre… et l’Agriculteur ne s’en porterait que mieux !
In fine, quelques points d’inflexion d’attention : – co- construire une Politique Agricole et Alimentaire adossée à une Loi Foncière propice à des Systèmes alimentaires durables, car le Sénégal n’en a jamais eu depuis son indépendance ; avec une centralité des Agriculteurs et un Etat régalien éthique, répartiteur équitable et régulateur juste. Une telle Politique Agricole et Alimentaire articulerait en harmonie sociale et en cohérence territoriale les 9F : le foncier, la filière, le forum, le financement, le forum, la formulation, la formation, la formalisation et la fiscalisation ; – promouvoir des sociétés coopératives à la base qui se regroupent en Interprofessions qui à leur tour se rassemblent en Institution consulaire agricole qui, toutes légales/légitimes/représentatives, font l’objet d’une bonne gouvernance statutaire et d’une performance utilitaire. Les Agriculteurs, autonomes et professionnels aux métiers reconnus et valorisés, constituent le capital humain et social régulièrement et périodiquement bien informé et formé avec l’appui d’un expert et expérimenté continuum Recherche-Formation-Conseil agricole ; – disposer d’une souveraineté en semences de tous niveaux et sur toutes filières (création variétale, obtention et maintenance, multiplication et production, tri et conditionnement, contrôle et certification, distribution…) ainsi qu’en fertilisants minéraux et organiques à empreinte écologique vertueuse ; tout comme une mécanisation doublée d’une motorisation et d’une digitalisation de l’agriculture avec objets connectés et applications embarquées de gestion optimale des fermes et firmes… via des centres de services (para/péri) agricoles qui demeurent dans l’innovation, l’incubation et l’innervation…
L’enjeu est une Agriculture souveraine, saine et sûre d’un Sénégalais d’Honneur dans un Sénégal de Bonheur».
Par Nabi Rahma NDENE, Citoyen.