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samedi, novembre 23, 2024
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Décryptage de la situation Socio-économique et politique du pays: «Le contexte national nécessite un Pm qui pourrait suppléer le PR pour l’essentiel de la gestion des questions de l’État…»

ENTRETIEN…

 Le Président Club Sénégal Émergent, Youssou Diallo, décrypte la situation économique, l’augmentation du coût de la vie au Sénégal, la nomination prochaine du PM, la mise en place de la prochaine Assemblée nationale.

 Monsieur DIALLO Bonjour.

Vous êtes le Président du Club Sénégal Émergent, et aussi PCA de la SONACOS SA. Quelle analyse votre organisation a-t-elle faite de cette situation de hausse très sérieuse des prix des denrées alimentaires?

 Pour ce qui concerne la situation actuelle, nous ne sommes pas du tout surpris au club Sénégal Émergent, parce que dans le cadre de nos différentes réunions et de nos déclarations rendues publiques, nous avions averti depuis le début de la Covid-19, en 2020, qu’en fait, on s’acheminerait vers des difficultés d’approvisionnement, non seulement sur le plan alimentaire mais aussi vers des difficultés par rapport aux importations, à l’approvisionnement du monde et de nos pays en particulier en produits alimentaires et en denrées stratégiques du fait de la fermeture des frontières et des menaces de récession et à la probable rupture des chaînes logistiques.

En conséquence, nous avions dit qu’il était possible pour qu’on se retrouve dans une situation d’inflation du fait du renchérissement des coûts et de l’insuffisance d’offre de produits et bien de consommation au niveau mondial. Cela s’est révélé exact parce qu’avec la Covid-19 nous avons constaté que sommes entrée dans une période de récession au niveau mondial, dans l’ensemble des pays développés comme au niveau des pays en voie de développement. A cela s’est rajoutée maintenant la situation de ni guerre ni paix entre l’Ukraine et de la Russie. Cette partie de l’Europe  est une zone extrêmement importante dans le cadre de l’approvisionnement du monde non seulement en céréales, en fertilisants (engrais, urée) mais aussi en énergie particulièrement en ce qui concerne le gaz et le pétrole.

Ceci se surajoutant à la situation qu’il y avait déjà avec la Covid-19 qui n’est pas encore terminée avec le renchérissement du fret, avec la déstabilisation des chaines d’approvisionnement sur le plan logistique, il était normal que nous assistions à une telle situation. Aujourd’hui, l’état des lieux économique au niveau des pays développés nous donne un taux d’inflation qui varie entre 9 et 10%, au niveau de l’Afrique, nous avons un taux d’inflation qui dépasse les 7%. Je signale que le Sénégal est à 5,2% de taux d’inflation. Donc, en termes d’inflation, le Sénégal est en dessous de la moyenne africaine.

Question: Pour ne pas dire que la situation est moins grave ici ?

Absolument, en tout cas, sur le plan statistique, voilà un peu la situation. Mais, elle est grave parce qu’une augmentation généralisée du niveau des prix a des conséquences sur l’ensemble des ménages et particulièrement au niveau des ménages pauvres et à faibles revenus, bien qu’au niveau de l’Etat du Sénégal, il y a eu des efforts extrêmement importants qui ont été faits pour éradiquer voir atténuer la situation.

Question : C’est là où j’allais en venir. Gouverner c’est prévoir. Si l’Etat savait que la situation serait telle qu’elle est aujourd’hui, il fallait peut-être prendre des mesures à l’avance. Est-ce que ça été fait ?

Bien sûr, c’est ce que j’étais en train de vous expliquer. Non seulement l’inflation est mondiale. Tous les états ont pris des mesures mais particulièrement au Sénégal. Imaginez-vous si le verrou de l’augmentation des prix des hydrocarbures et de l’énergie n’étaient pas bloqués; parce que aujourd’hui l’État a énormément subventionné pour bloquer le niveau des prix de l’énergie et des hydrocarbures qui impactent directement le transport, l’électricité, l’eau, qui va impacter l’ensemble des prix et coûts à l’échelle nationale.

Maintenant, au niveau des denrées alimentaires aussi vous avez le blocage des prix de certaines denrées de première nécessité riz, sucre, huile, farine, etc. et qui dans une large mesure a atténué l’inflation. Il s’y ajoute maintenant l’augmentation des salaires et des revenus qui est presque une augmentation généralisée et substantielle.

L’Etat a non seulement agi sur les prix mais aussi sur les revenus et de manière simultanée, pour maintenir le niveau de vie des sénégalais.

Donc, tout cela contribue à maintenir à un niveau acceptable le pouvoir d’achat des sénégalais. Nous sommes dans un pays qui est très ouvert. Nous commerçons beaucoup avec le monde. Et, les effets de l’inflation importée, nous n’y pouvons pas grand-chose. Ajouté à cela, il y a renchérissement aussi du dollar. Le franc CFA qui est arrimé à l’euro, s’est déprécié par rapport au dollar de 11% ces derniers temps, du fait du renchérissement du dollar.

Je vous rappelle aujourd’hui qu’il y a presqu’une parité favorable au dollar vis à vis de l’euro dont nous dépendons. Et une bonne partie; presque 40% de notre dette est libellée en dollar et la plupart des produits que nous importons sont libellés en dollar,  en particulier les hydrocarbures. Cela explique en partie la situation extrêmement difficile que vivent les populations sénégalaises, les ménages en particulier. N’eut été les mesures prises  et les anticipations faites par le gouvernement, je crois qu’on aurait assisté à une situation beaucoup plus grave que celle que nous sommes en train de vivre.

Question: Oui, vous venez de peindre un tableau assez beau, mais par rapport à ce que les sénégalais vivent quand même M. Diallo, il semble y avoir un fossé assez important parce que ces mesures-là ne sont pas très bien ressentis par la plupart des sénégalais. Le coût de la vie reste cher et justement on remarque une incapacité pour ne pas dire une incompétence des autorités à réguler le marché. Ce qui rend aussi la situation beaucoup plus difficile. Est-ce qu’à ce niveau-là il ne fallait pas prendre des mesures? Quand je parlais de mesures c’est vraiment à ça que je pensais on le disait dernièrement; dans une ruelle vous vous retrouvez avec trois prix pour un même produit. Est-ce que les autorités ont pris des mesures en ce sens?

Non, je n’enjolive pas la situation, je ne la rends pas belle, mais, j’explique pour que les gens puissent comprendre. On régule un marché. Je vous ai parlé de l’ensemble des subventions et des blocages qui ont été faits au niveau des prix des denrées de première nécessité et stratégiques. Je vous rappelle qu’au Sénégal, on est dans une situation de liberté sur le plan économique, le marché est quasiment libre .Il n’y a que quelques prix qui sont administrés ou régulés. Et, il s’agit de prix de denrées stratégiques comme le carburant, l’énergie, le riz, la farine de blé, certains formats d’huiles etc.même au niveau des huiles ce ne sont pas l’ensemble des huiles qui sont bloqués.

Et, du fait de l’inflation qui est importée et de la rupture des chaînes d’approvisionnement,  il y a des effets mécaniques de transmission de l’inflation au Sénégal. Ça vraiment, c’est une contrainte difficile que le Sénégal et les sénégalais subissent .Du fait de la liberté économique, les commerçants et les opérateurs économiques ajustent leurs prix par rapport aux coûts réels pour pouvoir s’en sortir.

Question: Parce qu’on a noté des hausses sur certains produits que rien n’explique…?

Bien sûr, au niveau du marché, il faut reconnaître qu’il y a de la spéculation à certains niveaux. Vous savez, quand l’offre et la demande ne correspondent pas, quand l’offre est inférieure à un moment donné, comme ce qui s’est produit sur le marché de l’oignon, il y a des conséquences; ce n’est pas parce que ce sont des produits locaux que les  effets de transmission de l’inflation mondiale ne se répercutent pas sur leurs prix. Il y a le transport et les autres services.

Question: Mais c’est là où l’État est attendu en termes de régulation…?

Non, Non… ça ce ‘est pas l’État. C’est le fonctionnement du marché, de l’économie réelle. Ce que l’État peut faire c’est atténuer plus ou moins les impacts. Mais l’État ne peut pas avoir une intervention décisive,  parce que l’économie de marché est une science et obéit à un certain nombre de règles implacables. Le commerçant qui est sûr que s’il vend il va perdre de l’argent, soit il ne vend pas ou bien il ajuste ses prix à un niveau qui lui permet d’aller vers des prix d’équilibre profitables .Maintenant, ce sont les effets de spéculation qui ont été dénoncés par rapport au marché de l’oignon. Je crois qu’aujourd’hui les prix sont relativement corrects par rapport à la situation du marché.

Question: La situation économique du pays, comment se porte-t-elle, selon vous?

 Alors, la situation économique du pays est correcte, acceptable, par rapport à l’environnement de récession et particulièrement d’inflation au plan mondial. Et pour un pays comme le Sénégal qui dépend de l’extérieur pour une large part par rapport à ses importations d’hydrocarbures, de produits alimentaires et de biens d’équipements, nécessairement cette situation impacte négativement la situation sociale.

Mais il faut reconnaître que sénégalaise est bien gérée, l’État se soucie d’abord de la protection des citoyens et des consommateurs. Et de ce point de vue là je vous ai expliqué les mesures qui ont été prises par l’État, à tous les niveaux, non seulement pour augmenter les salaires, les revenus et les retraites mais aussi, pour subventionner et bloquer les prix de certaines denrées de première nécessité.

Aujourd’hui, je vous signale que l’État, à ce niveau-là, entre 900 et 1000 milliards ont été dépensés depuis le début de cette crise-là. Donc au niveau des effets d’atténuation de la crise, il y a eu des mesures importantes prises mais aussi en termes de perspectives de relance de l’économie et de continuation des politiques structurelles qui ont été initiées depuis le Plan Sénégal Émergent (PSE). J’en veux pour preuve les politiques qui ont été initiées en matière d’autosuffisance en riz et en céréales, d’autosuffisance en oignon, de produire et consommer local et par rapport à la relance des exportations sur certains produits comme la mangue et d’autres produits.

Dans le cadre des politiques agricoles mises en œuvre, on ne peut pas inverser les tendances du jour au lendemain, il faut un peu de temps, mais le trend des réformes est bon, il faut avancer résolument et plus vite, il faut accélérer. Ce qu’il faudrait, c’est amplifier et développer ces politiques et faire pratiquement de la politique agricole pratiquement, la première priorité de ce pays. Et je pense que du point de vue des investissements qui ont faits, il y a encore des efforts beaucoup plus importants à faire; parce que quand on parlait d’autosuffisance, de sécurité alimentaire, il y en a d’ailleurs des sénégalais qui soutenaient que le riz n’est pas de qualité, etc. Mais je crois que dépendre de l’extérieur pour ce qu’on mange c’est quasiment la pire des choses et je crois que depuis le PSE, le Président Macky SALL s’est inscrit dans la perspective de régler le problème de l’agriculture et de l’alimentation des sénégalais.

Question: En perspective de 2024, quel genre de gouvernement faut-il au Président SALL pour bien terminer ce mandat, selon vous ?

Les contextes ayant un peu changé aujourd’hui, du point de vue de l’essentiel, vous savez la nomination du Premier ministre dépend essentiellement de deux facteurs; le facteur le plus important qui est la situation d’ensemble du pays.

Aujourd’hui, comme nous l’avions dit au niveau Club Sénégal Émergent, il ne faut plus une primature comme les anciennes primatures, pléthoriques, goulots d’étranglement, etc. Il ne faut aujourd’hui ce que nous appelons une primature rationnalisée, légère, souple, qui ne coûte pas grand-chose mais qui impacte réellement sur les politiques et qui améliore notamment la situation des sénégalais, particulièrement les situations relatives aux politiques économiques pour réduire le coût de la vie et soutenir l’économie. Et de ce point de vue-là, il faudrait une personne qui ne vienne pas à la primature pour apprendre, mais il faudrait pratiquement quelqu’un qui est prêt à l’emploi, donc qui a un profil de technocrate, de quelqu’un qui connaît bien les rouages de l’État et effectivement qui viendrait tout de suite pour embrailler et puis continuer les politiques déjà enclenchées par le Président.

Question: Vous ne militer pas pour un Premier ministre politique ? 

 Vous savez, quand on dit «  politique.» et «technocrate.», les politiques sont aussi des technocrates. Ça vraiment c’est une dichotomie que je ne comprends pas; parce que tous ceux qui sont dans le gouvernement, pour l’essentiel sont des politiques, ils sont des gens qui ont des diplômes très élevés, qui ont fait des études extrêmement complexes et sérieuses et qui sont des experts dans les domaines où ils sont nommés.

Question : Il y en a chez qui la politique prend le dessus, quand même…? 

 Je ne le comprends pas trop.

Donc, le deuxième aspect pour la nomination du PM, j’embraille pour parler des contingences politiques. Parmi ces contingences il y a la candidature ou la non- candidature du Président Macky SALL.

Si le PR décide de se présenter comme candidat à la prochaine présidentielle, il va s’en dire que la configuration du Premier ministre sera différente par rapport à si le PR n’était pas candidat. Ça je crois que c’est aussi autre lecture qu’il va falloir avoir par rapport au prochain Premier ministre qui va être nommé.

Donc, je crois que ça dépend fondamentalement de ces deux paramètres. Le contexte national qui nécessite un Premier ministre qui travaille, qui s’occupe des dossiers pour régler les problèmes des sénégalais et d’autres part un Premier ministre qui pourrait suppléer le Président de la République pour l’essentiel de la gestion des questions de l’État si tant est que le PR se présente comme candidat à la prochaine présidentielle parce que, nous n’avons plus beaucoup de temps d’ici 2024.

Question: Alors, et vue la configuration un peu de l’Assemblée nationale, à quelle législature faut-il s’attendre à votre avis ?

Je crois que nous avons tous quelques peurs légitimes par rapport à configuration actuelle de l’Assemblée.

Non seulement il faudrait une majorité qui aille dans le sens du consensus et du dialogue mais aussi,  il faudrait une opposition qui soit responsable parce que nous n’avons pas élu des députés pour qu’ils continuent à faire de la politique politicienne à l’Assemblée nationale.

Du côté de l’opposition en particulier, nous les exhortons à ne  pas tenter de bloquer l’assemblée et des institutions.

Du côté du pouvoir nous les exhortons à faire preuve d’humilité, d’esprit de dialogue et de compromis pour le bien de la République.

Donc, je crois que cette attitude de responsabilité devrait prévaloir au niveau de l’Assemblée pour que ce pays ne se retrouve pas dans une situation de blocage. L’électorat s’est prononcé, a élu les députés de la façon dont il a eu à les élire, c’est aux élus d’en tirer les conséquences et montrer aux Sénégalais qu’ils sont responsables. Et ce qui importe, c’est moins les positions de pouvoir mais c’est le règlement des problèmes et des préoccupations des Sénégalais.

 

 

 

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