Mamadou Dia, originaire de Gandiol, à la pointe de l’Atlantique, porte ouverte à l’océan depuis Saint-Louis du Sénégal, chargée de l’Histoire précoloniale déjà, puis coloniale, est prédisposé à tourner le regard vers l’Occident. Évidence de la nature, la pointe du Sénégal tourne le dos au reste de l’Afrique subsaharienne, et fait face à la mer.
Mamadou voyage dans la sous-région, les terre ouest-africaines, puis s’embarque en 2006, à l’orée de ses 23 ans, dans une pirogue en direction de l’Espagne depuis des ports de migration mortelle hélas devenus célèbres. Yarakh, Mbour, Goxu Mbathie,.. tous auparavant villages de pêcheurs, désormais embarcadères de mort.
«Clandestin» quatre ans, il raconte dans un ouvrage son périple et ses conditions de vie. Puis il revient au Sénégal, à Gandiol, pour bâtir des projets inclusifs pour et avec les jeunes de son village. Fondateur de l’ONG Hahatay de Gandiol, il définit son approche comme de «l’autoréalisation communautaire». Son souci majeur est de se distancier des discours et pratiques usuelles du «développement». Politiques, influenceurs, Etat, Organisations diverses (ONGs comme Partenaires au développement (BM, USAID, AFD, GIZ, JICCA, …).
Mamadou essaie de mettre en œuvre un nouveau paradigme:
➔ Contribuer par les migrants eux-mêmes au développement de leur espace d’origine. Il s’agit, et par-là même, de lutter contre l’émigration. «Irrégulière» en primauté, puisque la question est au centre d’âpres négociations dans le monde, au point d’être le sujet de clivage des gouvernements européens, américains, et même du Maghreb.
➔ Mais fondamentalement, il s’agit d’éradiquer le besoin d’émigrer pour bénéficier de meilleures conditions économiques de vie. Les opportunités sont plus grandes et plus fructueuses et à terme la décision de partir n’est pas une alternative, mais une illusion.
➔ Sapostrue est celle d’un ancien migrant qui est revenu et a la conviction qu’acteur associatif, il peut contribuer au-delà de ceux qui n’apportent aucun témoignage de vécu. La force du témoignage face aux théories d’acteurs totalement déconnectés du sujet, souvent sans vécu.
➔ Le pari est de donner de la force discursive à la restitution de son expérience ainsi que celle de témoins qui ont risqué leur vie, face à la production de discours théoriques destinés aux bailleurs et les organisations œuvrant à la lutte contre l’émigration clandestine. Pour obtenir leur soutien, nécessaire, en cohésion avec des politiques globales qui n’adressent plus le niveau local, cellulaire, réel, d’un quotidien nourrit de rêve. Lutter avec ceux qui ne sont encore jamais partis et qui rêvent aussi d’un départ, d’une fuite.
Synthèse: Cécile Khadiome Diouf