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Saint- Louis et les effets de l’émigration clandestine: Des quartiers dépeuplés de leur jeunesse, des familles décimées

Bolo DIAW (avec En Relief)

L’information à travers laquelle le gouvernement espagnol prépare des vols de retour pour renvoyer les migrants sénégalais chez eux, selon plusieurs médias espagnols tels que « El Periódico de España », est loin de décourager les candidats à l’émigration clandestine. Ceux-là sont plus déterminés que jamais à défier l’océan pour rejoindre l’Espagne à la recherche d’une vie meilleure. À Saint-Louis, ce fléau est loin d’être éradiqué, avec au moins deux embarcations chargées de candidats à l’’’aventure ambiguë’’ quittant la vieille ville pour rejoindre les côtes espagnoles depuis près d’une semaine.

Le populeux pécheur de Guet Ndar a été fortement touché par l’émigration clandestine ces derniers jours. Chaque jour, au moins deux pirogues quittent la Langue de Barbarie pour rejoindre les côtes espagnoles. Malgré le rapatriement prévu par le gouvernement espagnol, comme le rapporte « El Periódico de España », le nombre de décès et les interceptions de la marine nationale, les candidats à l’émigration clandestine demeurent plus déterminés que jamais.

L’émigration clandestine est plus que jamais d’actualité dans cette communauté où la majorité des jeunes qui exerçaient des métiers liés au secteur de la pèche ont quitté, ou continuent de quitter le pays pour embarquer dans des pirogues de fortunes en direction de l’Espagne. Ces jeunes qui veulent coute qu’à coute aller en Espagne, à leurs risques et périls, ne voient que le nouvel Eldorado que représente les côtes espagnoles. Dans ce quartier, les candidats au départ bénéficient souvent de la compréhension de leurs parents, même si certains, de peur d’être dissuadés, partent sans autorisation parentale.

Contrairement à un jeune rapatrié nommé Yoro Diallo, qui cherche toujours un moyen de retenter sa chance, lui a reçu l’autorisation de son père pour partir en Espagne, comme l’ont fait ses amis. «Je m’appelle Yoro Diallo, je réside à Goxxu Mbacc (l’un des quartiers de la Langue de Barbarie), et rejoindre les côtes espagnoles a toujours été mon rêve. La vie au Sénégal est difficile, et les opportunités pour les jeunes sont minimes, voire inexistantes. En tant que pêcheur, je gagne chaque année ce que gagnent mes amis qui se trouvent actuellement en Espagne, voire davantage. Notre métier ne nous nourrit plus en raison de la présence de bateaux étrangers, du manque de licences de pêche et du manque d’investissement significatif de la part des autorités étatiques pour soutenir ce secteur confronté à la rareté des ressources. Cette situation est une source de motivation pour moi de tenter ma chance avec l’émigration clandestine. J’ai déjà tenté une fois et j’ai passé près de quinze jours en haute mer, affrontant des moments où nous n’avions plus rien à manger ni à boire, et étions contraints de boire de l’eau de mer. Par la grâce de Dieu, nous avons finalement débarqué au Maroc, où les autorités marocaines nous ont demandé une modeste somme d’argent pour être rapatriés. Heureusement pour moi, j’avais mon téléphone avec moi, et grâce à un ami, j’ai pu contacter mon père via WhatsApp, qui a finalement réglé la somme et m’a fait rapatrié. Je considère tout cela comme un destin, car je suis toujours à la recherche d’une vie meilleure pour moi et ma famille, et je ferai tout en mon pouvoir pour rejoindre l’Espagne.

Le désespoir des jeunes au cœur des débats 

De plus, de nombreux jeunes se trouvent dans l’incapacité de trouver un emploi après leurs études, ce qui les pousse à chercher des opportunités ailleurs, y compris à l’étranger. À la rencontre d’un jeune diplômé du quartier qui répond au nom de Adama Gaye, il se livre.  » En réalité, cette détermination des jeunes à immigrer clandestinement, malgré les risques, témoigne d’un profond désespoir. Ils ont atteint un niveau de détresse tel qu’ils ne mesurent plus les dangers, considérant la traversée en pirogue vers l’Espagne comme leur seule issue pour réaliser leurs rêves, non seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour leurs familles. De plus, l’influence de nombreux jeunes déjà arrivés de l’autre côté, qui les encouragent à les rejoindre, crée une excitation et une volonté ardue de franchir ces dangers. À ce stade, ils ne semblent plus préoccupés par les risques inhérents à leur voyage », laisse entendre Monsieur Gaye.

L’émigration clandestine: un sujet de sermon dans les mosquées

À Guet Ndar, le phénomène de l’émigration clandestine suscite l’inquiétude des religieux et des imams, qui consacrent exclusivement leurs sermons à cette problématique. Dans son sermon de ce vendredi, l’imam de la grande mosquée du quartier a abordé divers thèmes visant à sensibiliser les jeunes à l’égard de l’immigration clandestine.

« Il est devenu impératif de secourir cette jeunesse abandonnée à elle-même, et cela ne constitue pas seulement une nécessité, mais une obligation primordiale », déclare l’imam, qui estime que « la richesse ne réside pas seulement dans l’abondance de biens matériels, mais aussi dans la richesse de l’âme ». Selon l’imam Mbaye Dieng, il ne reste presque plus de jeunes hommes dans ce quartier, la plupart d’entre eux étant partis, et ceux qui sont encore présents envisagent également de partir. L’imam a conclu son sermon en lançant un appel aux autorités locales et nationales, aux religieux et à tous les acteurs concernés. « J’en appelle donc aux autorités étatiques et locales, aux leaders religieux ainsi qu’à tous les responsables et à notre vaillante jeunesse, à plus de vigilance, de conscience et d’humanisme pour un avenir radieux pour notre chère nation que nous chérissons tous. »

 

 

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