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Bloc-notes de Abdou GNINGUE : Bonnet blanc et… Blanc bonnet?

La semaine écoulée a été marquée par des manifestations violentes qui ont causé des dégâts énormes. De paisibles citoyens, commerçants et autres hommes d’affaires ont vu leurs biens vandalisés et des édifices publics brûlés donc réduits en cendres. Des milliers de sénégalais ont ainsi perdu leurs emplois mettant de facto leurs familles dans la précarité.

Les propriétaires de ces magasins qui sont assurés vont se frotter les mains parce qu’ils seront indemnisés par les grosses sociétés d’assurance. Quant aux employés ils seront mis en chômage technique sans salaire. Avec quels moyens les familles de ces travailleurs vont subsister. Les loyers, la Scolarité des enfants sans parler des trois repas, que dis-je, l’unique repas du jour.

Ceux-là qui réclament la préservation de la démocratie dans notre pays et s’attaquent en même temps à des organes de presse, font fausse route. On ne peut pas vouloir quelque chose et son contraire. Les organes de presse sont les sanctuaires où travaillent les journalistes chargés de rendre visible et vivante cette démocratie. Sans une presse libre on ne peut pas parler de Démocratie. Pour ce qui est de la suspension de deux stations de télévision, je trouve la mesure excessive qu’il faut éviter mais aussi demander aux animateurs de ces médias d’être plus responsables parce que refusant d’être les bras armés de politiciens. Ce n’est pas parce qu’on est patron d’un groupe de presse qu’on peut s’en servir à sa guise pour de la propagande politique avec de faux publireportages.

Il a été constaté dans différents médias audiovisuels, en direct, des images irresponsables d’enfants, diffusées en boucle . C’est des enfants qui sortaient des écoles que des cadreurs d’images faisaient répéter des slogans politiques. C’est inimaginable dans un pays où on doit protéger le droit des enfants. Ces images ne devaient en aucune façon passer à l’antenne et dans le petit écran. Dans les pays où on respecte ce droit, tout journaliste qui braque sa caméra sur des enfants mineurs sans les flouter, cacher son visage, peut faire face à la justice. Pourquoi au Sénégal certains hommes de médias se délectent de ces images inacceptables.

Quand un journaliste fait un direct il n’est pas plus intelligent que ceux-là qui sont chez eux et qui suivent. Tout commentaire qui ne participe pas à éclairer les téléspectateurs sur ce qu’ils regardent peut être tendancieux surtout quand le journaliste se met à la place des politiciens qui ont pris en otage le peuple sénégalais.

Nos confrères doivent rester professionnels et se considérer comme des sentinelles. Qui respectent l’éthique et la déontologie du métier de journaliste. Son appartenance politique ne doit jamais se refléter dans son travail sinon il aura failli à sa mission d’être objectif devait les faits, sa précieuse matière première.

Les femmes de Ziguinchor, se faisant appeler les femmes de Casamance ont organisé une marche pacifique pour demander la libération du responsable de Pastef. Elles ont été rectifiées intelligemment, dans un communiqué, par le regroupement des femmes pour la… paix en Casamance qui appelle à l’apaisement des deux parties. Elles n’ont pas exigé la libération du leader de Pastef. Ce qui est un comportement civique à saluer. Mais il faut éviter de dire les femmes de Casamance exigent la libération de Ousmane Sonko comme l’ont demandé les femmes de Ziguinchor.

Cet appel peut suggérer un certain communautarisme à bannir.

En effet, quand on dit les femmes de Ziguinchor, avec les yeux de l’esprit, on peut voir la population féminine de cette ville du Sud, composée de Diolas, Woloffs, Sereers, Mandingues etc. Mais dès l’instant qu’on parle de femmes de Casamance, les pêcheurs, en eau trouble, peuvent s’y engouffrer et faire de la subversion en ciblant une ethnie. J’aurais bien aimé d’ailleurs que les confrères qui ont fait ce reportage montrent quelques interviews expresses dans nos différentes langues nationales parmi les manifestantes pour montrer que c’est des femmes originaires de toutes les contrées de notre pays mais qui vivent en toute harmonie dans cette ville et sont guidées par une démarche citoyenne. Parce que ce qui s’est passé à Ziguinchor pourrait être organisé par les femmes des iles du Saloum pour soutenir leur enfant. Et personne n’aurait quelque chose à dire.

Donc il faut faire très attention à l’emploi des mots dans des situations pareilles.

Ici, le rôle des journalistes est très important pour éviter toute manipulation de l’opinion. Le Sénégal est un pays où toutes les ethnies vivent en harmonie grâce au génie de nos anciens qui ont mis en place ce cousinage à plaisanterie où je me permets d’échanger librement en tant que Sereer avec mes cousins Pulaars et Diolas. Pour ces derniers, selon la légende, c’est deux sœurs Aguene, ancêtre des Diolas et Diambogne qui a donné naissance aux Sereers. Ces deux sœurs qui naviguaient dans une pirogue se sont séparées quand leur embarcation s’est brisée en deux.

Chacune est partie de son côté pour créer une famille. Belle histoire parmi tant d’autres qui font que notre pays est une exception dans une sous-région où le communautarisme et l’ethnocentrisme ont créé des troubles incontrôlables. Que Dieu nous en garde! Donc Vigilance vigilance !

Au village, les sages se sont réunis et ont demandé au président de la République de s’adresser à la Nation pour calmer les esprits. Dans pareille circonstance, les sacrifices et les prières sont recommandés surtout qu’il y a mort d’hommes. C’est pourquoi la parole du chef est obligatoire pour rassurer le peuple et éviter le chaos total dans notre pays très affecté par la pandémie entrainant une crise économique et sanitaire sans précédent. Je crois d’ailleurs que cette situation a amené les autorités à vouloir alléger le couvre feu pour que l’activité économique puisse reprendre jusque vers des heures un peu avancées dans la soirée.

En effet, dans les quartiers, avec cette crise économique qui a réduit beaucoup de pères de familles au chômage, le phénomène des vendeuses de sandwich et autres bouillies de mil (fondé) pour le dîner prolifère. Les familles n’assurent les dîners que pour les enfants , les adultes eux doivent se débrouiller.

Ces manifestations sont donc une aubaine pour toutes ces populations vivant dans la précarité et besogneuses. On ne doit pas s’étonner de ces pillages des magasins surtout dans les rayons alimentation. Pourtant des pères de familles très à cheval sur la loi islamique ont demandé, à leurs enfants, venus avec des produits alimentaires piqués dans les magasins pillés, de les retourner parce que Haram (impropre ) à la consommation pour un bon musulman. Parole d’un sage à saluer en direction d’une jeunesse en perte de valeurs et surtout, de repère, par ces temps qui courent.

La société civile !? sénégalaise qui devait servir de médiatrice entre l’Etat et les politiciens s’est auto disqualifiée en prenant part volontairement à un rassemblement mixte entre partis politiques et d’autres organisations qui sont supposées être équidistantes de ces formations politiques.En effet, une société civile qui veut être crédible doit se démarquer des politiciens et donner son point de vue dans la marche de la Nation sans parti pris.

En France, les gilets jaunes, dans un élan citoyen, ont revendiqué pendant de longs mois, dans tout le pays, des manquements du gouvernement d’Emmanuel Macron dans les difficultés que rencontrent les français. Les partis politiques ont tenté d’infiltrer leur mouvement mais les organisateurs les ont chassés comme des malpropres et des opportunistes qui voulaient récupérer leur lutte. C’est cela un mouvement citoyen responsable.

Notre société civile!? sénégalaise, quant à elle, semble confirmer ceux qui les traitent de politiciens encagoulés. Ce qu’ils ne peuvent plus réfuter dès l’instant que leurs différentes organisations s’associent ouvertement à travers des Communiqués des manifestations de politiciens qui sont dans leur rôle d’opposants. A moins qu’on puisse parler de bonnet….Blanc et …Blanc bonnet en ce qui concerne les acteurs politiques et ceux de la Société Civile.

Abdou GNINGUE
Journaliste Citoyen du monde rural

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